ÉLISE BISSCHOP (1925-1964)
En 1919, après la Grande Guerre, René et Marie Bisschop quittèrent Paris et s’installèrent dans l’Yonne, département situé au nord de la Bourgogne. En quête d’une vie plus paisible, le couple Bisschop fit l’acquisition du Domaine des Eaux-Bues sur la commune de Trucy-sur-Yonne. Ce domaine, très éloigné du village, perdu dans un écrin de verdure et de bois, comprenait la ferme Saint-Hubert et une vaste étendue de terres cultivables. Pour gérer le domaine agricole, René, blessé de la Grande guerre, et Marie employaient du personnel. Le 31 mai 1925, le jour de la Pentecôte, Marie mit au monde une fille qu’elle nomma Élise et, le 22 mai 1927, elle eut un fils appelé Pierre. Les enfants Bisschop vécurent une enfance complice à la ferme Saint-Hubert. Dans ce cadre privilégié, la petite Élise, à la santé fragile, s’éveilla à la beauté de la nature et au mystère de la Création toute entière. Dans les années 1930, la famille Bisschop déménagea au bourg voisin de Mailly-le-Château. René, souffrant d’une maladie handicapante aux articulations, ne pouvait plus gérer le Domaine des Eaux-Bues qui fut vendu à une famille de fermiers. Quant à Élise, hospitalisée pendant la petite enfance, très malade des bronches, son état nécessitait la proximité d’un médecin.
À Mailly-le-Château, Élise découvrit la vie animée d’un petit village de campagne. Elle noua de fortes amitiés avec les filles du bourg et développa un profond respect filial envers l’abbé Léon Poitout. Élise, qui avait une dévotion marquée à Dieu, à la Vierge Marie et à l’Enfant Jésus, était très heureuse de fréquenter l’église Saint-Adrien du village.
En 1934, elle réalisa sa Confirmation puis, en 1936, sa Première Communion. À l’âge de onze ans, portée par la grâce de sa Première Communion, Élise se consacra secrètement à Dieu. Deux ans après cette union mystique avec le Seigneur, Élise se donna pour devise : « Sourire à tout et à tous par amour pour Jésus. »
Élève brillante, Élise obtint son Certificat d’études primaires en 1937 et se classa première du canton. Douée pour les arts et les lettres, elle pratiquait le dessin et composait des poésies. À l’âge de treize ans, elle débuta l’écriture de son recueil de poèmes et de chansons. Éprouvée par des bronchites chroniques et des crises d’asthme à répétition, Élise fut cependant empêchée de poursuivre des études supérieures.
Quand la Seconde Guerre mondiale éclata en Europe, Élise était une jeune fille de quinze ans, très priante et très investie dans la paroisse.
En août 1941, après le décès de l’abbé Léon Poitout, Élise eut un nouveau curé : l’abbé André Générat. Dès la première rencontre, elle fut si bouleversée par sa ferveur qu’elle déposa son âme dans l’âme du curé. Au fil des années, l’abbé André Générat devint le Père spirituel d’Élise et l’un de ses modèles de piété.
Grâce au Père André Générat, Élise débuta le catéchisme des enfants et elle se consacra au patronage des jeunes filles. Portée par une foi vivante en Dieu, Élise multiplia les initiatives dans la paroisse. Elle participait notamment à l’organisation de petits spectacles pour les enfants du catéchisme.
Débordante de joie et très souriante, Élise fut une catéchiste passionnée. En 1944, à l’âge de dix-neuf ans, elle composa la Prière de la « Maman d’âme » (autobiographique) où elle remerciait Dieu de lui avoir confié « les âmes des enfants qui sont vôtres ».
À cette même période, elle fut investie dans différents mouvements de jeunesse chrétienne. Elle fut surtout une jaciste très impliquée dans le mouvement chrétien la Jeunesse Agricole Catholique Féminine (JACF). Dans les années 1950, elle devint même la chef de secteur de Mailly-le-Château.
L’année suivante, le 31 mars 1951, René Bisschop mourut des suites de sa longue maladie. La nouvelle fut très dure pour Élise et sa mère Marie, vivant désormais seules dans la grande maison située place de la République. Pierre Bisschop n’habitait plus le domicile familial. Marié à Colette P. le 22 octobre 1951, il résidait dans un autre village de l’Yonne.
Élise et Marie, très malades, l’une des bronches et l’autre souffrant de problèmes cardiaques, se retrouvèrent dans une situation précaire. Les difficultés financières furent quotidiennes et, limitées physiquement, elles éprouvaient de grandes difficultés à entretenir la maison et à accomplir les tâches quotidiennes comme remonter le bois ou le charbon de la cave.
Pour assurer des revenus, Élise confectionnait des brosses à domicile pour l’usine de son village et elle roulottait des mouchoirs pour une certaine Madame Mercier. Élise n’avait pas un travail régulier, les périodes d’inactivité et de chômage furent très nombreuses. Pour subsister, les deux femmes louaient des chambres dans leur grande maison de Mailly-le-Château et elles puisaient dans le modeste héritage légué par le père de famille.
Malgré les tourments de la maladie et la pauvreté, Élise continuait de distiller sa joie tout autour d’elle. Elle se définissait d’ailleurs par son sourire offert aux autres. Constante et persévérante dans la foi, Élise fut toujours combative dans la maladie. Elle ne se plaignait jamais car elle acceptait de souffrir pour Dieu. Elle disait accomplir la volonté du Seigneur.
En novembre 1954, Élise fut hospitalisée à l’hôpital Saint-Germain d’Auxerre pour y subir une opération des bronches puis, en novembre 1957, elle fut admise à l’hôpital Saint-Antoine à Paris pour une série d’examens. Les médecins annoncèrent à Élise qu’elle ne guérirait pas. À chaque hospitalisation, Élise fut un modèle de joie et de compassion, elle consacrait une grande partie de son temps à prier silencieusement pour le personnel soignant et pour les malades.
À partir de 1958, la santé d’Élise se dégrada. La jeune femme, qui depuis 1956 prônait l’apostolat du sourire, ne cessa jamais de faiblir dans sa foi. Elle assistait chaque jour à la messe, récitait quotidiennement le chapelet et, quand sa santé le permettait, elle accomplissait son Chemin de Croix. Quand Élise était trop malade, elle s’unissait aux heures de messe.
Toujours munie de son crachoir, Élise donnait l’illusion d’être en forme mais sa maladie, très handicapante, était un lourd fardeau à porter. Souffrant de crises d’asthmes et de bronchites virulentes, d’insuffisances respiratoires, d’engourdissements et de congestions cérébrales, Élise était épuisée par la maladie.
En 1959, l’abbé Marcel Girard fut nommé à la cure de Mailly-le-Château. Élise fut très heureuse de ce prêtre qu’elle considérait comme un saint homme mais elle n’oubliait pas le Père André Générat, nommé à la paroisse voisine de Saint-Florentin. Ce fut, entre eux, le début d’une longue correspondance, perdurant jusqu’à la mort d’Élise.
Après son séjour à l’hôpital Saint-Antoine, Élise continua d’enseigner le catéchisme aux enfants. Depuis 1958, elle n’agissait pas seule, les catéchistes de Mailly-le-Château étaient aidées par les Sœurs Dominicaines Missionnaires des Campagnes d’Island, près d’Avallon. Élise aimait particulièrement ces religieuses, très dévouées. Elle disait avoir trouvé auprès d’elles une seconde famille. Parmi toutes ces dominicaines, Élise se lia d’amitié avec la jeune Sœur Solange de la Croix. Les deux femmes échangèrent beaucoup sur la vie religieuse car Élise ressentait l’appel de Dieu. Finalement, en 1960, Élise devint postulante dans une fraternité dominicaine de malades nommée la Fraternité Notre-Dame du Rosaire. Située à Dijon, elle était dirigée par le Père dominicain Jourdain Bochin.
Du 8 au 14 octobre 1962, Élise se rendit au grand pèlerinage du Rosaire à Lourdes avec tous les malades de sa fraternité. C’est lors de ce grand rendez-vous annuel que les postulants prononçaient leurs vœux. Élise fit ses vœux à la chapelle Saint-Frai à Lourdes. Là, elle reçut le simple scapulaire réservé aux tertiaires et prit le nom en religion de Sainte Rose de Lima.
De retour à Mailly-le-Château, la Tertiaire Dominicaine Élise Bisschop continua ses œuvres de piété et de dévotion mais, empêchée par la maladie, elle dut abandonner le catéchisme. En 1963, dans une lettre adressée au Père André Générat, elle se disait désormais réduite « à un apostolat de présence aimante, silencieuse et priante ».
Entourée des Pères André Générat, Marcel Girard et Jourdain Bochin, Élise fut toujours confortée dans sa foi. Elle priait sans relâche pour les enfants, les prêtres, ses amis, sa famille et pour son Mailly. Élise se contentait des choses simples de la vie et puisait dans la nature tous les trésors de Dieu pour nourrir son âme.
Le 18 mars 1964, Élise fut transportée à l’hôpital d’Auxerre car son état nécessitait des soins urgents. La jeune femme séjourna un long mois à l’hôpital. Le 9 avril 1964, épuisée, elle mourut sur son lit d’hôpital dans les bras aimants de sa mère. Élise pressentait sa mort. Dans une lettre datée du 20 mars 1964 à son Père spirituel, elle écrivait : « J’ai une façon fort peu classique de prier en ce moment. Mais je crois être bien en état d’offrande et d’abandon. »
La mort de la souriante catéchiste Élise Bisschop, à l’âge de trente-huit ans, suscita une vague d’émotion dans tout le pays. Pour Marie Bisschop, la disparition de son « enfant chéri » fut une grande souffrance et une peine inconsolable.
La réputation de sainteté d’Élise, bien qu’elle soit connue dès son vivant par le témoignage de ses amis, éclata véritablement après sa disparition :
- En 1964, le Père Jourdain Bochin, qui souhaitait rendre hommage à Élise, fit éditer son magnifique recueil de poésies et de chansons. Il le distribua aux malades de la fraternité dominicaine et aux paroissiens de Mailly-le-Château. Ceux qui connurent Élise furent très touchés par cette vision intimiste d’Élise.
- Le 30 avril 1964, l’abbé Marcel Girard, conscient de l’immense valeur d’Élise, écrivit à la paroissienne Jacqueline B. : « dans quelques temps (quelques années peut-être) je pense qu’on éditera une plaquette... une sainte de chez nous ! »
- En mai 1964, le Père Pierre Van Ede, de la paroisse voisine de Châtel-Censoir, titra un article sur Élise « Une sainte de chez nous » dans le bulletin paroissial La collégiale Châtel-Censoir.
- Le 4 décembre 1964, le Père Pierre Van Ede mit la Journée des Catéchistes à Vermenton sous l’égide d’Élise Bisschop.
Après la mort d’Élise BISSCHOP, il y eut encore d’autres témoignages de sa réputation de sainteté et le constat que sa tombe continuait d’être fleurie par des anonymes. Ce témoignage est rapporté dans une lettre de Marie Bisschop, décédée en 1979.
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La cause en béatification d’Élise BISSCHOP fut ouverte par Monseigneur Hervé GIRAUD, l’archevêque de Sens et Auxerre, le 1er mai 2017.
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